Pour la réflexivité dans les logiques, y compris en psychologie.

        Auteur  : Jacques Lavau.

1.     Qu’est la réflexivité dans les logiques ?

    1.1.     Définitions  :
    1.2.     Description systématique.
        1.2.1.     2-logique d’ordre zéro, ou logique binaire.
        1.2.2.     1-logique d’ordre zéro, ou logique unaire.
        1.2.3.     0-logique d’ordre zéro, ou logique nulle.
        1.2.4.     3-logique d’ordre zéro, ou logique ternaire.
        1.2.5.     multi-logique d’ordre zéro.
        1.2.6.     Les humoristes et l’extraction des binarités  :
        1.2.7.     2-logique d’ordre un.
        1.2.8.     Indications.

2. Les     ordres de réflexivité supérieurs.

    2.1.     Conquête par l’extérieur et par la confrontation dialectique.
    2.2.     L’ordre de réflexivité négatif (ou « moins un »).
    2.3.     Recoupements.

3.     Application aux regards du psychologue social, et du clinicien.

4.     Conclusion.

 

Pour la réflexivité dans les logiques, y compris en psychologie.

Auteur  : Jacques Lavau.

1.   Qu’est la réflexivité dans les logiques ?

1.1. Définitions  :

Cardinal d’une logique  : nombre entier, qui dénombre les objets extérieurs au logicien, que celui-ci considère simultanément, et entre lesquels il fait un lien et une distinction, tel qu’une opposition. Grammaticalement, la logique est exprimée par une proposition, qui peut être en langage naturel, ou codée mathématiquement ou graphiquement, voire peut rester non codée, dans un langage non verbal analogique, tel que gestuel, ou dans une attitude systématique et figée, que le sujet se rend incapable de remettre en cause.

Ordre de réflexivité d’une logique  : nombre entier, dénombrant le nombre de fois où le logicien est pris en compte dans sa propre logique.

Départ de la numération de l’ordre ? Il est plus cohérent de partir de zéro que de un. Toutefois, prononcer les entiers négatifs pose problème à plusieurs. Il existe hélas un ordre de réflexivité encore plus bas que celui d’où nous sommes partis  : on peut évoluer de l’inconscience normale du nouveau-né, vers la censure active. Solution  : ne pas prononcer « ordre moins un », mais « ordre négatif ».

 

1.2.   Description systématique.

1.2.1.   2-logique d’ordre zéro, ou logique binaire.

C’est celle avec laquelle vous êtes parti à la conquête du monde, quand tout allait bien, que vous aviez le ventre plein, et que vous étiez rassuré quant à la présence et à la bonne disposition de la pourvoyeuse des besoins essentiels. Vous avez vite constaté que les visages humains ont deux yeux, vous avez deux mains, votre mère a deux seins.

Pour le Code Civil  : « Tous les biens sont meubles ou immeubles ».

1.2.2.   1-logique d’ordre zéro, ou logique unaire.

Logique égocentrique, à deux aspects principaux : « Wah ! Appel-maman ! », et « Vous ne valez que pour mes besoins. »

C’est la logique des grandes urgences de l’époque. Si ces urgences là sont mal remplies au cours de vos premiers mois de vie aérienne, alors bonjour les dégâts dans tous les autres domaines.

1.2.3.   0-logique d’ordre zéro, ou logique nulle.

Evolution pathologique de la précédente  : « Vous ne valez pas grand chose, et j’ai bien raison de vous exterminer. ».

1.2.4.   3-logique d’ordre zéro, ou logique ternaire.

Les dieux indo-européens vont par trois. Ainsi trois dieux grecs régnaient sur trois sortes d’hommes  : les vivants, les morts, et ceux qui vont sur la mer.

En se propageant vers cet espace culturel non sémite, le judaïsme christianique imita ce trait culturel  : son dieu se scinda en trois personnes. La division sociale indo-européenne, jusqu’à la Révolution Française, fut en trois ordres ou castes  : une caste guerrière, une caste sacerdotale, et un Tiers-état, chargé de nourrir les deux autres.

 

1.2.5.   multi-logique d’ordre zéro.

Après ces cas pathologiques, nuls, ou unaires, il est revigorant de lire la richesse du stratège chinois du 4e siècle avant notre ère. Sun Tzu enseignait les cinq facteurs  : « Le moral, les conditions atmosphériques, le commandement, le terrain, et la doctrine », les cinq qualités du général, les cinq sortes d’agents secrets, les sept facteurs purement militaires, les neuf sortes de terrain, etc...

 

1.2.6.   Les humoristes et l’extraction des binarités  :

Plusieurs humoristes sont devenus très habiles, pour extraire les logiques correctement développées, à partir des infirmités unaires ou nulles. Exemples de développement de unaire à binaire  :

Coluche : « Omo lave plus blanc. C’est donc qu’avant, il lavait moins blanc. Et moins blanc, c’est gris clair. »

Un graffiti anonyme faisait écho à  : « Attention ! L’ennemi vous écoute ! Les murs ont des oreilles ! », par « Fais attention à tes oreilles ! Elles ont des murs ! »

Stephen Leacock : « Résumé des chapitres précédents  : il n’y a pas de chapitres précédents. (...)

Son long visage aristocratique reflétait sa noble origine. Son cheval, il est vrai, avait une tête encore plus longue. (...)

Depuis sa plus tendre enfance, Gertrude avait été élevée par sa tante, qui lui avait inculqué avec soin les principes chrétiens. Pour plus de sûreté, la tante lui avait également enseigné les règles du mahométisme. »
Version originale  :  « Synopsis of Previous Chapters  : There are no Previous Chapters. (...) At the same time that the dogcart entered the avenue at one end there might have been seen riding down it from the other a tall young man, whose long, aristocratic face proclaimed his birth and who was mounted upon a horse with a face even longer than his own. (...) From her earliest infancy Gertrude had been brought up by her aunt. Her aunt had carefully instructed her in Christian principles. She had also taught her Mohammedanism to make sure. ...   » (NONSENSE NOVELS, by STEPHEN LEACOCK )

Faute de place, je ne cite pas ici la Modeste Proposition, de Swift, qui est un chef d’œuvre de développement de logique nulle vers binaire  : manger en fricassée les enfants mâles des irlandais.

 

1.2.7.   2-logique d’ordre un.

Un exemple classique de problème insoluble (je l’ai emprunté à Desmarest et Druel. Je le présente différemment  : eux parlaient de « ternarité », confondant ainsi le cardinal de la logique, avec sa réflexivité), si on ne monte pas d’un degré dans l’échelle de réflexivité :

Votre mission consiste à faire entrer le ballon dans le filet. Sans plier ni découper la page !

 

 

1.2.8.   Indications.

Tant qu’on ne considère que la position de ces objets d’encre sur du papier, le problème du ballon dans le but est insoluble. C’est alors une logique dont l’ordre de réflexivité est zéro.

Mais si vous changez de problème, et considérez des objets de vision, formés dans votre cerveau, à l’aide de votre système de vision binoculaire, la solution est immédiate1. En incluant l’observateur et ses propriétés dans votre champ d’examen, vous êtes passé à une logique dont l’ordre de réflexivité n’est pas nul. Notre début est très modeste, car nous n’en sommes encore qu’à l’ordre de réflexivité un  : on n’a inclus qu’une seule fois l’observateur-logicien dans la logique. C’est du moins un début.

Dans un début d’ouvrage antérieur, de 1981, nous avions développé un classement bidimensionnel des logiques par cardinal, et par ordre de réflexivité. Il est intéressant de comparer le développement de la maturité d’un individu, et sa conquête des cardinaux croissants, et des ordres de réflexivité croissants. Enfin, maturité éventuelle, et conquête non moins éventuelle... Les deux allant de pair.

L’étude par Piaget2 des premiers stades de la construction de la notion d’objet permanent, de la construction de l’espace et de la causalité par l’enfant entre zéro et deux ans, nous a donné beaucoup de détails sur les étapes de construction de la réflexivité d’ordre un. Par exemple au stade 4, l’enfant fait confiance à sa propre action, et à la répétition de son action déjà bénéficiaire, pour obtenir à nouveau l’objet convoité. Toutefois, il ne fait pas confiance à l’action de l’autre, pour se garantir un succès. Il ne fait pas bien l’unification en représentation de l’action de l’autre, et de la sienne propre. Il ne se représente pas dans l’action musculaire de l’expérimentateur (ici, le père). Sa motricité encore insuffisante ne lui permet pas de mimer l’action de l’autre avec son propre cortex moteur; ou moins, pas encore assez.

Alors qu’au stade 6 (très progressif, de 13 à 22 mois selon Piaget), l’enfant est capable de reconstituer mentalement les actions de l’autre qui ont été cachées à sa vue, et de se représenter les causes non visibles des effets visibles. Le détail des étapes nous permet de comprendre que cette construction des représentations est passée par les conquêtes motrices, et par la coordination de ses actions et de ses sens. Il n’a pu conquérir la représentation du corps et des actions de l’autre, qu’à mesure de ses propres progrès moteurs, et de la meilleure qualité de ses imitations. Ce qui en retour lui donne une bonne représentation de lui-même.

Tout cela nous désigne avec précision une coopération entre aires prémotrices et aires coenesthésiques pariétales comme les principaux circuits de l'empathie, et d'une théorie de l'esprit d'autrui. Plus l'ordre de réflexivité sera élevé, et plus le foyer concerné se déplacera vers les aires préfrontales du cerveau. Question sans réponse pour le moment : chez nos canidés ou nos équidés, quelle est au juste la représentation d'autrui ? Et comment cela se répartit-il entre thalamus, pallidum, putamen, noyau caudé, cortex entorhinal, etc. ? On ne sacrifie pas un cheval pour ce genre de curiosités, et on ne le fait pas non plus rentrer dans le scanner...

 

2.   Les ordres de réflexivité supérieurs.

2.1.   Conquête par l’extérieur et par la confrontation dialectique.

Les ordres de réflexivité supérieurs sont ceux qui concernent l’adulte en général, et le psychologue en particulier.

Pour le psychologue, l’observation essentielle est que chaque ordre de réflexivité ne se conquiert que de l’extérieur, par les confrontations avec les regards, les réactions et les dires des autres. Un bébé ne se reconnaît dans le miroir que par l’intermédiaire de l’image de la mère ou du père qui le porte, et en comparant la position du bébé porté dans le miroir par un reflet parental, avec sa position propre, porté par le vrai parent en chair et os. Et de même, tous les autres ordres de réflexivité ne se conquièrent que par un détour extérieur, par les visions extérieures, bien accueillies et assimilées.

 

A l’ordre un, l’observateur-logicien entre dans le champ d’investigation, mais le deuxième logicien qui l’observe, n’est pas, lui, conscientisé.

A l’ordre deux, un troisième observateur observe et calcule le deuxième observateur. Par exemple pour calculer l’optimum pour la survie de l’organisme vivant.

A l’ordre trois, un quatrième observateur observe et calcule le troisième observateur. Par exemple pour sacrifier l’objectif d’ordre deux à un objectif supérieur.

L’ordre cinq semble suffire à la sagesse humaine, atteignable en une vie humaine.

 

A quel âge les conquiert-on ? La réalité de chaque individu est très hétérogène, il arrive de plus qu’elle soit pleine d’accidents et de régressions, et tous les individus sont très différents.

Par exemple, le même individu pouvait être remarquablement précoce dans l’ordre un, capable à deux ans de poser des limites à sa mère, « Toi, tu veux que je sois sage ! Mais moi, j’aime pas être sage ! », et être en pleine régression fusionnelle à vingt ans, « Non non ! J’ai pas à m’exprimer ! T’as qu’à réfléchir ! »  : Papa, devine moi ! Ta boule de cristal suffira à remplacer ma parole abolie.

 Toutefois, il y a des seuils imposés par la biologie. La guenon Washoe nous a prouvé qu’elle maîtrisait bien l’ordre zéro, assez bien l’ordre un, et mal l’ordre deux. Mise en présence d’autres chimpanzés pendant sa première nuit en ménagerie, elle les désignait en American Sign Language comme des « chiens noirs et bruyants », ne pouvant pas encore les reconnaître comme de sa propre espèce, ayant toujours vécu en environnement humain.

 L’ordre deux ne peut guère être conquis et conscientisé sans l’intervention du langage symbolique  : le parler et le comprendre, puis le lire. Ou au moins comprendre, si l’on tient compte des enfants qui comprennent tout, mais ne parlent que très tard - y compris Albert Einstein, et Milton H. Erickson... Une adolescence normale devrait compléter la maîtrise de l’ordre deux. L'ordre deux porte bien sur l'autoconservation de la personne à long terme.


L’ordre trois est une conquête du jeune adulte, par de vraies responsabilités sociales et parentales qui l’obligent à dépasser sa petite personne et son petit orgueil. Il sacrifie l'autoconservation de la personne, au profit de la solidarité envers la génération suivante, typiquement envers les bébés et les enfants.
Deux exemples extrêmes  :

·         Cette mère de famille, qui avait ses enfants sauvés de la carcasse de l’Airbus écrasé sur le mont Sainte Odile, qui a entendu les cris de frayeur d’une fillette restée bloquée à l’avant par les flammes, qui est retournée dans la carcasse la chercher. On a retrouvé leurs cadavres. Elle portait la fillette dans ses bras, et elles étaient près de la sortie.

·         Ce garde du corps, confronté à une grenade dégoupillée, jetée au milieu de l’amphithéâtre; qui se coucha sur la grenade. Son sacrifice sauva tous les autres : pas un seul blessé grave autour de lui.

 
L’ordre quatre est une conquête bien rare. Il permet la mise en perspective de son clan, de sa famille, de l’insertion de ses propres valeurs dans celles du ou des groupes d’appartenance. L’ordre quatre semblerait suffire au psychologue clinicien - certains en sont convaincus -, mais j’augure mal du psychologue social, ainsi que du thérapeute familial, qui s’y limiteraient. A la faveur de quelles épreuves conquiert-on l'ordre de réflexivité quatre ? Ma conjecture est que l'épreuve indispensable est constituée par les fortes attaques personnelles que nous font vivre le négativisme de nos adolescents, quand ils attaquent si violemment nos instincts territoriaux et nos certitudes les plus intimes. Quel est mon corrélat ? C'est justement par échec total à la conquête des ordres trois et quatre, à l'âge d'acquérir l'ordre quatre, que se déclenchent les premiers grands accès de paranoïa violente, vers quarante, quarante-cinq ans, voire la cinquantaine.

Analogie : c'est à l'âge-état-civil de jeune adulte que se révèlent la plupart des entrées dans la schizophrénie, à force que la réflexivité précédente, d'ordre deux, de calcul de sa propre survie et de sa place minimale sur Terre, autrement, n'a jamais pu se réaliser. L'analogie porte sur le retard irrattrapable d'un ordre de réflexivité, par rapport à celui qui devrait être maintenant construit sur le précédent.

L’ordre cinq est le plus élevé de ceux que j’aie eu l’occasion d’observer jusqu’à présent. Il fait le grand manageur, le grand homme politique, le grand anthropologue  : celui qui est capable de sacrifier sa caste, sa classe sociale (au moins à court terme) pour des intérêts encore plus généraux, qui les dépassent. Evidemment, l'ordre cinq ne peut se construire que sur tous les ordres de réflexivité précédents et sur leur solidité, ce qui est un prérequis sévère. L'ordre cinq implique une mise en perspective impitoyable envers ses propres stratégies de conquête et d'occupation de pouvoirs : on calcule sa mise à la retraite, que léguera-t-on à ceux qui vous suivront sur Terre ? Quels cadeaux empisonnés ? Comment détoxiquer les poisons ? Comment déminer les terrains piégés ? L'ordre cinq est donc une solidarité transgénérationnelle accomplie, trans-ethnique, et pourquoi pas trans-spécifique.

 

2.2.   L’ordre de réflexivité négatif (ou « moins un »).

Depuis 1981, je soutiens qu’il s’agit d’une grave régression pathologique.

Alors qu’à l’ordre zéro, le logicien ne niait pas sa propre existence, mais se contentait d’exister sans conscience explicite de soi, et de tirer parti du monde pour soi, à l’ordre négatif, il y a négation explicite de soi.

En cardinal zéro, c’est la censure de tout, dont l’autisme est une forme possible.

En cardinal un, on trouve les fusions  : fusion fasciste, fusion dans une religion totalitaire, dans l’identification à un gourou. Exemples  : « Dieu est dieu ! Nom de dieu ! », ou « Le Fascisme n’est pas un parti ! C’est l’Etat ! ».

En cardinal deux ? Cela peut ressembler à la niche du matheux pathologique (heureusement, mes collègues ne sont pas tous pathologiques !).

2.3.   Recoupements.

Consulter Harold F. Searles pour la richesse et la complexité du processus d’individuation de l’enfant3. Cet auteur frappe par sa profonde reconnaissance de la profondeur des relations affectives entre l’enfant et sa mère, dès le sein, de l’immensité de leurs composantes positives, même si la mère est mauvaise, ambivalente ou folle. Lisez-le  : vous n’en sortirez pas indemne !

 

3.   Application aux regards du psychologue social, et du clinicien.

Reprenons l’échelle de réflexivité, en y incluant l’affectivité, et notamment la place de l’empathie. Le nourrisson est égocentrique  : les autres objets et personnes ne se distinguent pas encore de ses besoins. A deux ans, certains enfants sont des experts en manipulation de leurs parents  : leur empathie est manipulatoire. A cet âge, ne pas leur demander encore d’expliquer leurs « trucs » !

Même piège  : on pourrait croire que dans une famille à interaction schizophrénique, l’enfant qui se désigne comme schizophrène déclaré, pour maintenir à lui seul la cohérence psychique de sa mère, ou la cohérence de sa famille, pratique une logique d’ordre trois, puisqu’il sacrifie son individu. Toutefois, sa conscientisation n’atteint en rien l’ordre trois, mais reste largement bloquée à l’ordre zéro, par non-établissement des frontières entre l’enfant et la mère  : il confond des niveaux biologiques incompatibles, entre l’individu et le groupe familial. Tandis que l’équipe de cliniciens qui s’efforce d’intervenir sur une telle famille à interaction schizophrénique doit avoir à sa disposition au moins un ordre de réflexivité supplémentaire, pour la mise en perspective de chacun de ses affects et de ses contre-transferts, et pour arbitrer les sacrifices qu’elle fera, ceux qu’elle demandera 4. Elle doit donc avoir conquis la maîtrise d’ordre quatre et de son affectivité, et de sa conscientisation.

La réflexivité est inscrite en actes dans le dispositif adopté par les psychothérapeutes des deux écoles milanaises de thérapie familiale  : un seul thérapeute en salle avec la famille, responsable de la séance de bout en bout. Mais toute la séance est observée depuis une glace sans tain par en deux autres thérapeutes, qui notent tous les jeux et interactions. Les observateurs peuvent interrompre le thérapeute en l’appelant au téléphone. Lui peut aussi de son chef interrompre la séance et aller trouver ses collègues.

Autre intervention de la réflexivité  : la prise en compte de tous les autres référents (tels que médecin traitant) et psychothérapeute, du poids des institutions et de leurs idéologies, et autres infirmités, à commencer par l’employeur du psychologue en institution. Cela peut se traduire en pratique de nombreuses façons. Par exemple  : « Aujourd’hui, tu m’as obligé à agir en policier, qui rétablit l’ordre social. Quand tu te seras décidé à avoir sur moi un autre regard, tu sais où me trouver, et quand tu y seras prêt, on pourra commencer un travail thérapeutique. »

La transmission de la doctrine et du savoir-faire (par des livres, par des enseignements) est un des cas où doit pouvoir intervenir une maîtrise de l’ordre réflexif cinq. Cette maîtrise est également indispensable quand il faut franchir des barrières culturelles difficiles. Le psychologue social est appelé à avoir de plus en plus souvent à avoir ce regard transculturel, où il voit sa propre culture de l’extérieur, et dans la mesure du possible, il voit de l’intérieur une culture lointaine. Contrairement à un comparatiste d’un autre métier (un linguiste, ou comparatiste du droit, ou même un anthropologue), en tant que psychologue, il doit aussi être au clair avec chacune de ses affectivités et enculturations d’ordre réflexif inférieur (en particulier, n’en confondre aucun des niveaux biologiques), sous peine de trahir ses missions et ses clients.

4.   Conclusion.

Quoiqu’elle ne soit encore enseignée nulle part, la réflexivité dans les logiques est un outil interprofessionnel utile partout, dans toutes les professions. C’est une des composantes indispensables à une ingénierie en concepts, qui soit une discipline de généraliste, et dont la vocation est d’être commune à toutes les professions, au service de chacune, et surtout au service de bien meilleures communications interprofessionnelles. Les psychologues ont à donner l’exemple de s’en emparer et de la maîtriser. Qui donnerait l’exemple à leur place ?

 

1    Rapprochez vous de la page ou de l'écran, en sorte que votre oeil gauche voie le but, et votre oeil droit voie le ballon.

2    Jean Piaget. La construction du réel chez l’enfant. Delachaux et Niestlé, Lausanne 1967.

3    Traduction française  : Harold Searles. L’effort pour rendre l’autre fou. NRF Gallimard, Paris 1977. Collected papers on Schizophrenia and related subjects. Harold F. Searles, 1965.

4    Mara Selvini-Palazzoli, Luigi Boscolo, Gianfranco Cecchin, Juliana Prata. Paradoxes et contre paradoxes. ESF. (1978).

Luigi Boscolo, Gianfranco Cecchin, Lynn Hoffman, Peggy Penn. Le modèle milanais de thérapie familiale. ESF 1993 (1987 Basic Books).

Mara Selvini-Palazzoli, Stefano Cirillo, Marco Selvini, Anna Maria Sorrentino. Les jeux psychotiques dans la famille. ESF.

Jacques-Antoine Malarewicz. Supervision en thérapie systémique. Le thérapeute familial et son superviseur. ESF 1999.



Retour au début du document

Retour à l’accueil général

Retour à l’accueil Maths, Physique, Didactique.

Retour à l’accueil Psychologie et sciences humaines.